L’accord minier de 6 milliards de dollars entre la RDC et la Chine jugé “inadmissible”

La République démocratique du Congo devrait renégocier son accord d’infrastructure minière évalué à 6 milliards de dollars avec les investisseurs chinois, selon le projet d’un rapport commandé par un organisme mondial de lutte contre la corruption composé de gouvernements, d’entreprises et d’activistes.
Le projet décrit l’accord qui a été signé pour la première fois en 2008 comme « déraisonnable » et exhorte le gouvernement congolais à annuler l’amendement signé secrètement en 2017 qui a accéléré les paiements aux investisseurs miniers chinois et ralenti les remboursements des investissements dans les infrastructures.
Le rapport final devrait être publié courant octobre 2021 par l’Initiative pour la transparence des industries extractives (ITIE), qui suit les flux de revenus dans les secteurs pétrolier et minier et compte plus de 50 pays, dont la RDC, parmi ses membres.
Le rapport n’a aucune force juridique mais, si les principales conclusions du projet demeurent, il pourrait renforcer la pression de la RDC pour obtenir des conditions plus favorables des contrats miniers avec les investisseurs chinois.
Le gouvernement du président Félix Tshisekedi est en train de revoir le contrat de 2008 et les niveaux de réserves de la mine Tenke Fungurume exploitée par China Molybdenum après avoir déclaré que son pays n’obtenait pas un accord équitable.
Le Premier ministre Sama Lukonde Kyenge a déclaré dernièrement lors d’une conférence sur les mines : “Il doit y avoir un certain ajustement“.
Déboursement de fonds prévu à mesure que la production augmentera
Ces mesures représentent un recul rare de la part de la RDC, premier producteur mondial de cobalt métal pour batterie et premier mineur de cuivre d’Afrique, contre les investisseurs chinois qui contrôlent la majeure partie de son industrie minière.
Dans le cadre de l’accord conclu en 2008 avec le gouvernement de l’ancien président Joseph Kabila, les entreprises publiques chinoises Sinohydro Corp et China Railway Group Limited ont convenu de construire des routes et des hôpitaux financés par les bénéfices de la coentreprise congolaise de cobalt et de cuivre Sicomines.
Fred Zhang, un haut responsable de Sicomines, a défendu l’accord, affirmant qu’il avait stimulé le développement du peuple congolais et que Sicomines débourserait plus de fonds à mesure que la production augmenterait.
Le projet, rédigé par deux consultants congolais, préconise « la dénonciation par l’Etat congolais du caractère déraisonnable de la convention de joint-venture du 22 avril 2008 et le retour à la table des négociations par les actionnaires de la Sicomines ».
Il affirme que la participation de 68% des entreprises chinoises dans Sicomines est trop élevée puisque les Congolais ont apporté tous les actifs miniers et 32% du capital initial.
Il condamne l’amendement de 2017 non divulgué auparavant.
Des investissements déjà en retard
Aux termes du contrat de 2008, tous les bénéfices de la Sicomines iraient dans un premier temps au remboursement des investissements dans les projets d’infrastructure les plus urgents de la RDC. C’est sur cette base que le Parlement a accepté d’exonérer la Sicomines de tout impôt, indique le projet.
En vertu de l’amendement de 2017, seuls 65% des bénéfices de Sicomines doivent initialement servir au remboursement des investissements tandis que 35% vont aux actionnaires.
Le changement pourrait ralentir davantage le rythme des projets d’infrastructure, selon le projet. À ce jour, moins d’un milliard de dollars sur les 3 milliards attendus ont été investis, soit environ 1 milliard de moins que prévu à ce stade, dit-il.
“Cet amendement constitue une atteinte à la sécurité des intérêts de la République“, précise le projet.
Le projet de rapport appelle à réévaluer les réserves de la Sicomines, affirmant que l’étude de faisabilité de 2010 était erronée et annulant un autre contrat avec les mêmes investisseurs chinois pour la construction d’un barrage hydroélectrique.
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