Mort de Patrick Karegeya : la justice sud-africaine souhaite faire la lumière

Tensions en vue entre le Rwanda et l’Afrique du sud. L’assassinat de Patrick Karegeya, ancien chef des renseignements extérieurs rwandais le 31 décembre 2013 dans un hôtel sud-africain a brouillé les relations entre les deux pays. De nombreux éléments laissent à penser que Patrick Karegeya a été victime d’un assassinat politique malgré les dénégations de Kigali. Le tribunal de Randburg va entendre une trentaine de témoins afin de démêler les fils d’une affaire où espionnage et trahison rendent la vérité difficile à saisir.
Compagnon de lutte de Paul Kagame lors de la création du Front patriotique rwandais en 1987, Patrick Karegeya est devenu l’une des grandes figures de ce mouvement. Rentré au pays après le génocide de 1994, celui qui a fait ses classes au sein du renseignement ougandais prend la tête du National Security Service. Un poste important qui ne lui épargne pas la disgrâce au début des années 2000. Il est même emprisonné à deux reprises en 2005 et 2006 avant de prendre le chemin de l’exil en Afrique du sud en 2007.
C’est là qu’il retrouve une autre figure rwandaise tombée en disgrâce en la personne de Faustin Kayumba Nyamwasa. L’ancien chef d’état-major de l’armée rwandaise et Karegeya décident de fonder le Congrès national rwandais, parti d’opposition très critique du président Kagame. L’hostilité devient animosité entre les deux camps et les deux hommes sont condamnés par contumace au Rwanda après avoir été jugés coupables d’attaques terroristes. Vivant sous les pressions et menaces, les deux hommes semblent être la cible d’agents rwandais. Faustin Kayumba Nyamwasa échappe à plusieurs attentats, mais Patrick Karegeya est retrouvé mort le 1er janvier 2014 dans une chambre d’un luxueux hôtel sud-africain.
Si aucun suspect n’a été interpellé, la famille de la victime désigne immédiatement Kigali comme le commanditaire d’un « assassinat politique ». Les déclarations du président Paul Kagame et de ses proches en janvier 2014 ne sont pas de nature à évacuer cette possibilité. S’il nie toute implication, le chef d’Etat rwandais affirme que « la trahison a des conséquences ». Son ministre de la Défense se montre encore plus terrible en déclarant « Quand vous décidez de vivre comme un chien, vous mourez comme un chien ». Aucun élément concret ne vient étayer la thèse d’un assassinat commandité par Kigali et les témoignages qui doivent avoir lieu au tribunal de Randburg ont pour objectif de faire un peu plus de lumière sur cette sombre affaire.
Les relations entre les deux pays risquent fort de se tendre au cours des prochaines semaines. Il faut rappeler que l’Afrique du sud avait expulsé trois diplomates rwandais soupçonnés d’espionnage quelques mois après l’assassinat de Patrick Karegeya. Son compagnon d’infortune, Faustin Kayumba Nyamwasa, avait été victime d’un nouvel attentat auquel il avait miraculeusement échappé. Le Rwanda avait réagi à l’action de Pretoria en expulsant six diplomates sud-africains.
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