La France veut reprendre pied en Centrafrique

Mise à mal par les initiatives russes de ces derniers mois, la France tente de reprendre le leadership en Centrafrique. La venue à Bangui du ministre français des Affaires étrangères a été marquée par des déclarations qui ne laissent aucun doute quant aux intentions françaises. Des paroles et une politique du chéquier qui doivent peser sur des autorités centrafricaines séduites par une Russie de plus en plus entreprenante.
« J’ai toujours été là pendant les bons et les mauvais moments, tout le monde ne peut pas en dire autant ». C’est par ces mots savamment étudiés que le ministre français des Affaires étrangères a entamé sa visite officielle à Bangui ce samedi 4 novembre. Jean-Yves Le Drian connaît bien la Centrafrique puisqu’en qualité de ministre de la Défense, il a mis au point l’opération Sangaris visant a protéger le pouvoir et les populations des exactions rebelles. L’ex-militaire a troqué son uniforme pour celui de diplomate et a rappelé avec une certaine vigueur que la France était et doit rester le premier soutien du pouvoir central dans le pays.
Malgré l’aide de la France (militaire et financière), la Centrafrique reste dans une situation extrêmement préoccupante. Environ 75 % de son immense territoire est hors de contrôle de l’Etat. Des milliers de réfugiés s’entassent dans des bidonvilles et l’Etat peine à payer ses fonctionnaires. Bref, la situation est calamiteuse, et la Russie s’est engouffrée dans la brèche depuis plusieurs mois. Moscou se montre de plus en plus intéressé par la Centrafrique et a obtenu en décembre 2017 une exemption à l’embargo sur les armes qui pèse sur ce pays meurtri par les guérillas. Des armes russes ont ainsi pu être livrées tandis qu’environ 200 formateurs militaires russes sont sur le terrain. L’exemption touche bientôt à sa fin et la France entend redevenir le seul interlocuteur privilégié du pouvoir.
Pour se faire, Jean-Yves Le Drian a annoncé une aide financière directe de 10 millions d’euros. Une goutte d’eau dans le budget français, mais « cela correspond à deux mois de salaires pour les fonctionnaires centrafricains » pour citer les propos du ministre français. Une manière courtoise, mais plutôt explicite de dire que l’Etat tient grâce à l’aide de la France. 14 autres millions d’euros seront débloqués pour mettre en place des projets utiles au pays comme la construction de ponts rendus nécessaires lors de la saison des pluies.
A cette diplomatie du chèque, Paris n’oublie pas l’aspect militaire qui préoccupe grandement le président centrafricain. 1 400 fusils mitrailleurs seront livrés à Bangui. Préparer la guerre tout en assurant qu’il « n’existe aucune alternative à l’initiative de paix africaine ». Un message porté par le ministre français des Affaires étrangères qui étrille ainsi les efforts russes pour mener un dialogue à Khartoum entre toutes les factions rebelles et le pouvoir central. La France ne veut pas perdre la main et ce voyage est bien le signe que Paris souhaite rester le premier partenaire du pouvoir centrafricain.
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