Libération surprise de quatre Français détenus au Burundi

C’est une affaire d’Etat qui a fait trop de bruit et qui s’est assez rapidement conclue sur la libération de quatre ressortissants français arrêtés le 22 juin dernier. Les hommes d’affaires étaient venus à Bujumbura prendre le contrôle d’une société télécom burundaise achetée en avril dernier par une entreprise hongkongaise. Jetés en prison le 22 juin pour « faux et usage de faux, escroquerie et de constitution de société fictive », les quatre Français ont été relâchés dans la plus grande discrétion, ces derniers jours, avant d’être invités à quitter le territoire burundais.
Il y a des histoires qui font fuir les investisseurs. Celle vécue par Christophe Viguier, Sébastien Vacher, Abdallah El Khabdan et Laurent Foucher constitue un repoussoir pour tous ceux qui rêvent encore de s’établir au Burundi. Le pays nage en plein chaos et n’est pas très propice au business. La mise en prison de ces quatre représentants de la société télécoms ITS ne va pas jouer en la faveur d’un contexte économique, social et sécuritaire déjà très négatif qui fait fuir les investisseurs. Arrivés le 22 juin denier au Burundi, ils ont été arrêtés par la police, accusés de « faux et usage de faux, escroquerie et de constitution de société fictive », et envoyés dans des prisons différentes loin de la capitale.
Moins de dix jours plus tard, les quatre accusés étaient libérés, leurs passeports rendus et ils ont été invités à prendre le premier avion en direction d’un pays étranger. L’expulsion fut une affaire elle aussi rondement menée et si l’enquête continue, les Français sont presque blanchis des faits qui leur ont été reprochés. Toute cette affaire reste bien inexplicable si on n’y introduit pas les millions de dollars de bénéfices d’une société télécoms qui fait les beaux jours de certains dans les premiers cercles du pouvoir burundais.
En effet, la société qui devait passer sous le contrôle des quatre Français est en charge du contrôle des appels internationaux et de la taxe afférente de 32 centimes de dollar par minute. La société burundaise, rachetée le plus légalement du monde en avril 2018, est dirigée par des proches du pouvoir et n’a pas reversé les dividendes à l’Etat burundais comme la loi l’y oblige. Des dividendes élevés puisque l’entreprise dégage des millions de dollars de bénéfice.
L’arrestation des investisseurs étrangers ressemble à une tentative de préserver un business juteux qui se fait sur le dos de l’Etat. Les pressions ont été fortes pour que Bujumbura libère les prisonniers que l’on pourrait qualifier d’« économiques ». L’accompagnateur burundais est, quant à lui, toujours en prison. Interviewé par l’AFP, Gabriel Rufyiri, figure de la société civile explique l’intérêt de cette affaire : « On les a arrêtés et jetés dans une prison pour leur faire peur, les terroriser pour qu’ils renoncent à leur société et à leurs dividendes (…) mais cette affaire a eu le mérite de mettre à nu un racket généralisé au profit du parti au pouvoir et des plus hautes autorités du pays ».
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