Vers un dialogue national en Guinée équatoriale ?

Au pouvoir depuis près de 39 ans, Teodoro Obiang Nguema Mbasogo a surpris son monde en appelant le 11 juin à un dialogue national qui aura lieu au mois de juillet. L’annonce faite à la télévision a été suivie de la publication d’un décret précisant les conditions de ce dialogue. L’opposition en exil, également conviée à prendre part à cette réunion démocratique a d’ores et déjà déclaré que ses conditions devraient être respectées afin que le dialogue souhaité par le président Obiang soit vraiment inclusif.
Quelle est la réelle nature de l’offre de dialogue tombée à l’improviste le 11 juin dernier ? Alors qu’il intervenait à la télévision, le président de Guinée équatoriale a lancé une proposition destinée également aux exilés politiques. « Nous envoyons notre invitation au dialogue national à tous les Équato-guinéens dispersés dans la diaspora pour des raisons politiques, pour certains délits politiques, afin de rentrer ». Des paroles sages qui n’ont pas forcément été suivies de la même ouverture d’esprit dans le décret officiel appelant au dialogue. On peut notamment y lire : « malgré tous les efforts et l’atmosphère de paix et de stabilité interne que connaît la République de Guinée équatoriale, il y a encore des attitudes et des comportements de citoyens en intelligence avec des puissances étrangères qui prennent des mesures qui portent atteinte à la paix et à l’harmonie ».
L’opposition est invitée à s’exprimer, mais la rancœur et la défiance sont toujours de mise. La faible opposition démocratique qui subsistait encore dans le pays a été balayée après la tentative de coup d’Etat en décembre 2017. Les partis d’opposition qui font figures de satellites du pouvoir sont invités, mais ce sont les leaders en exil auxquels s’adressent les appels du pied. Le pouvoir tente de les rassurer en affirmant que seront adoptées « toutes les mesures politiques, juridiques, administratives, sociales et humanitaires pour faciliter la participation de tous les acteurs politiques exilés à l’étranger ».
L’opposition demeure sceptique et rappelle que cinq autres projets de dialogue national ont déjà été lancés au cours du règne de Teodoro Obiang. La Cored, principale plateforme de partis exilés a fait savoir que la main tendue du pouvoir serait serrée si plusieurs conditions préalables étaient respectées. Ainsi, la Cored appelle à la libération de tous les prisonniers politiques (c’est-à-dire une centaine de personnes), la présence de diplomates, d’observateurs et de médias internationaux. En élargissant le spectre des acteurs, l’opposition en exil souhaite obliger le président à respecter ses futurs engagements et à revenir à des pratiques plus démocratiques.