Centrafrique : un couvre-feu instauré à Bangui après un retour des violences

Le climat demeure tendu ce dimanche à Bangui, la capitale centrafricaine, après une nouvelle flambée de violences à proximité du PK5, un quartier à majorité musulmane, qui a fait au moins 36 victimes et une centaine de blessés. Le gouvernement centrafricain de transition a décrété dimanche un couvre-feu.
“A compter de ce jour, le couvre-feu est instauré de 18 heures à six heures dans la capitale. Les forces internationales et les forces de défense et de sécurité centrafricaines sont instruites afin que cette mesure soit strictement respectée”, a déclaré à la radio nationale le premier ministre, Mahamat Kamoun. Dans la journée de dimanche, des barricades ont été érigées dans plusieurs quartiers de la ville par des groupes de manifestants, perturbant la circulation à la suite du meurtre d’un jeune de confession musulmane. La plupart de ces barricades ont été démantelées par les forces de sécurité centrafricaines, qui ont fait usage de gaz lacrymogènes. Des tirs d’origine indéterminée ont également été entendus à la mi-journée.
Ce quartier fur déjà le théâtre des massacres inter-communautaires de fin 2013 à début 2014. Le renversement en mars 2013 du président François Bozizé par la rébellion Séléka a plongé l’ex-colonie française, déjà très instable et l’un des pays les plus miséreux au monde, dans sa plus grave crise depuis son indépendance en 1960. Ces tueries de masse entre communautés musulmanes et chrétiennes en 2013 et 2014 ont laissé une profonde cicatrice qui divise encore la population du pays. Le niveau des violences a depuis considérablement baissé. Mais des groupes armés sévissent toujours dans certaines parties du territoire et de très nombreuses armes de guerre circulent dans le pays et sont régulièrement utilisées pour des actes de banditisme.
Cette fois, des tirs ont été suivis par des mouvements de panique des habitants alors que des forces internationales – des soldats de la force française Sangaris et de la mission de l’ONU – prenaient position dans le quartier. Selon des habitants, le conducteur de moto-taxi a été égorgé samedi matin, pour une raison encore inconnue. Difficile de démêler le vrai du faux, tant la rumeur circule vite et alimente la paranoïa. Ce qui est sûr, c’est que des échanges de tirs ont repris pendant la journée de samedi. L’ONU a fait le choix de se positionner autour de la zone de tension pour éviter que la situation ne se propage à d’autres quartiers.
Cette décision est fortement critiquée par la population qui accuse les casques bleus d’avoir laissé faire. Cette situation inquiète les autorités religieuses. L’imam de la mosquée Ali-Babolo, Loisir Iyaya, appelle ainsi la population au calme. “Nous demandons aux jeunes de rester calmes et de ne pas commettre des exactions. A la population de Bangui et celle de la République centrafricaine en général, nous leur demandons de tenir compte de la cohésion sociale et de faire des réunions entre nous et nos frères chrétiens. Nous demandons à tous de rester calmes et de ne pas se venger”, a déclaré Loisir Iyaya.
Plusieurs milliers de personnes ont déjà fui leurs habitations pour se réfugier dans les camps de déplacés. Ces derniers avaient tendance à se vider ces derniers mois. Pour l’instant, le Haut Commissariat pour les réfugiés (HCR) ne donne pas d’estimations précises, car les camps de déplacés sont situés dans des zones encore inaccessibles.
Dans son allocution, Mahamat Kamoun a enfin lancé un appel aux travailleurs du secteur public et privé pour qu’ils reprennent leur travail dès ce lundi. Le gouvernement a appelé au calme et enjoint les manifestants à rentrer chez eux. Ceux-ci réclament la démission de la présidente de transition, Catherine Samba-Panza, qui se trouve actuellement à New York pour l’assemblée générale de l’ONU. Selon des sources proches du Conseil national de transition, le Parlement de la transition, la maison du président du CNT a été assaillie ce dimanche par des milliers d’habitants. Venus avec des corps, ils lui demandaient de prendre ses responsabilités. Des élections présidentielle et législatives sont officiellement prévues avant la fin 2015 pour clore le cycle de violences. Mais l’organisation des scrutins a pris beaucoup de retard, rendant plus que vraisemblable un nouveau report des élections.
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